Joëlle Mongis, Psychologue clinicienne spécialisée TCA et Obésité

Pourquoi il est souvent si difficile de perdre du poids

Dans un pays, la France, où la nourriture est disponible à tous les coins de rue, on se trouve parfois pris dans une contradiction. D’un côté, toute cette nourriture riche en abondance et en face, de façon officielle, un idéal de minceur qui est entretenu. Ce qui est « bien », c’est d’être mince. Or, nous ne sommes pas tous faits pour demeurer minces comme un mannequin quel que soit le type et la quantité de nourriture que nous ingérions.

 

Il y a le mythe et puis il y a la réalité.

 

Il y a ces rares femmes qui dès qu’elles ont accouché retrouvent leur taille de guêpe et puis, la majorité, qui généralement, mettront un an ou plus à retrouver leur poids antérieur à la grossesse et puis, il y a celles qui ne le retrouveront jamais.

 

En général, le problème de la perte de poids est mal posé. Si je vous demandais ce qu’il faut faire pour perdre du poids, vous me répondriez peut-être qu’il faut faire du sport et manger moins ou manger mieux, entendant par là manger moins de sucre et moins de gras.

 

Le problème est mal posé parce qu’il faut d’abord savoir si vous êtes en surpoids ou si vous n’aimez pas l’image que vous renvoie le miroir parce que vous ne correspondez pas à l’idéal de minceur que l’on vous vend jour après jour.

 

Vous pouvez le savoir en calculant votre IMC (indice de masse corporel)[1] qui vous dira si oui ou non vous êtes en surpoids. Mais l’indice de masse corporelle n’est pas un très bon outil car il ne peut pas dire si votre poids est fait davantage de muscles que de graisse ou vice versa. Il ne peut pas non plus dire si votre excès de graisse est dangereux parce qu’interne et enveloppant vos organes vitaux ou en superficie et simplement « disgracieux ». C’est dans un premier temps juste une indication qui peut malgré son imprécision être un premier indice quant à des risques liés à votre santé.

 

Votre tour de taille est un indice plus intéressant. Supérieur à 80 cm chez une femme et à 95 cm chez un homme, il devient préoccupant et indique que votre surcharge pondérale commence à impacter votre santé car votre excès de graisse serait viscéral.

 

Autre démarche à accomplir, aller voir son médecin et lui demander un bilan sanguin afin de faire le point avec lui sur d’éventuelles problématiques liées à votre prise de poids.

 

La première étape serait donc une prise de conscience.

 

On grossit souvent de manière insidieuse. Notre poids augmente tranquillement d’année en année, on se dit que c’est normal de grossir avec le temps (puisque c’est une idée qui est communément admise) et puis un jour, on s’aperçoit qu’on a pris vraiment beaucoup de poids dans le sens où ce poids nous gêne au quotidien. On se sent essoufflé quand on grimpe les escaliers, on aime de moins en moins se regarder dans le miroir, on n’aime plus se voir en photo, on doit refaire régulièrement sa garde-robe et on a droit parfois à des remarques peu sympathiques.

 

Vient le moment où l’on se dit que l’on va passer à l’action et perdre le poids pris. On regarde ces femmes à la silhouette parfaite dans les séries télévisées (parfois retouchées), sur les couvertures de magazine (toujours retouchées), et l’on se dit que l’on va retrouver sa taille d’il y a quelques années ou bien que l’on va atteindre la leur, qu’il suffit pour cela de faire des efforts, moins manger, faire du sport. Et on se lance, on a entendu parler de tel régime et on l’essaie, et on est régulier, et ça marche, on perd du poids, et on se remet au sport, on s’inscrit à la salle et on y va.

 

On a des résultats, on perd du poids, parfois beaucoup. Et puis un jour, ras-le-bol des frustrations que l’on s’impose depuis plusieurs semaines, plusieurs mois. Notre esprit et notre corps se rebiffent. Là, des compulsions peuvent apparaître, on est poussé vers tous ces aliments que l’on s’est interdit depuis plusieurs semaines, et on en prend une bouchée puis une autre, puis une autre et on ne peut plus s’arrêter. Finalement, on se remet à manger normalement sauf que notre corps qui a été privé pendant des semaines a appris à fonctionner avec moins de nourriture, alors que fait-il de ce nouvel arrivage ? Eh bien, il le stocke, car notre organisme est intelligent, il s’adapte à moins mais il s’adapte également à plus, c’est ainsi que l’on reprend le poids perdu et souvent plus que ce que l’on avait perdu.

 

Sur le plan psychologique, on s’en veut, on se trouve faible, minable, on devrait pouvoir tenir ce régime, on devrait pouvoir continuer à se priver pour rester mince et ce ad vitam aeternam, n’est-ce pas ?

 

Bizarrement, on ne pense pas à notre collègue mince comme un fil qui mange du kebab et du fast food plusieurs fois par semaine et qui ne semble pas prendre un gramme.

 

Et si le problème, ce n’était pas nous, mais notre métabolisme ?

 

On ne fonctionne pas tous pareil. On ne fonctionne pas pareil à tout âge.

 

Et certains aliments ont un pouvoir addictif et rassurants, ils jouent un rôle de doudou dans un monde qui parfois nous dépasse et ils nous aident à gérer un quotidien pas toujours évident à gérer.

 

SI vous grossissez, ce n’est pas votre faute, vos gênes sont en cause et les aliments qui vous attirent sont en cause.

 

Ce n’est pas votre faute mais vous êtes responsables de votre prise de poids dans la mesure où vous pouvez faire quelque chose, prendre des décisions et entamer des actions pour perdre du poids de manière intelligente.

 

Tout d’abord, la restriction alimentaire est toujours une mauvaise idée. Qui dit restriction dit frustration. Qui dit frustration dit craquage à un moment ou un autre.

 

La première étape, selon moi, est la prise de conscience. L’outil qui peut vous aider à prendre conscience de ce qui se passe au quotidien dans votre rapport avec la nourriture est la tenue d’un carnet alimentaire sur une semaine au moins.

 

Vous allez y noter ce que vous mangez, à quel moment de la journée et dans quel état d’esprit vous vous trouvez lorsque vous mangez. Êtes-vous détendu ? Êtes-vous stressé ? Êtes-vous angoissé ? Avez-vous faim ou mangez-vous parce que vous êtes convaincu que c’est l’heure de manger ? Mangez-vous par habitude ou par plaisir ? Mangez-vous à votre faim ou vous restreignez-vous ? Mangez-vous seul ou en compagnie ? Mangez-vous à la va vite ou prenez-vous votre temps ? Et après avoir mangé, comment vous sentez-vous, fatigué ? en énergie ? détendu ? Mieux ou moins bien qu’avant d’avoir mangé ?

 

Ça peut paraitre fastidieux, ennuyeux de tenir un carnet alimentaire mais cela peut se faire assez simplement. Vous n’êtes pas obligé de faire des phrases, vous pouvez juste noter des mots en vrac, vous pouvez aussi prendre des photos de vos repas, les commenter avec des émoticônes.

 

Je demande à mes patients de m’envoyer des photos de leur repas durant quelque temps avec leurs commentaires pour commencer à travailler sur cette prise de conscience.

 

La nourriture n’est pas une ennemie. Il est nécessaire de manger pour vivre même si certains prétendent vivre de prana subtil 😉. Nous devons être attentifs à ce que nous mettons dans notre corps parce que notre corps est précieux et que nous devons en prendre soin si nous voulons qu’il nous mène loin.

 

Je crois davantage à la prise de bonnes habitudes en matière d’alimentation que dans la motivation qui nous permettrait de tenir un régime. Si l’on s’applique à manger différemment, plus en accord avec nos besoins, au bout d’un moment, de façon subtile, nos goûts changent. Il n’y a pas d’interdits. Il y a plutôt des moments où l’on est tenté de faire des choix discutables. Ce qui est important c’est de repérer ces moments et de comprendre ce qui nous motive dans ces moments-là : la convivialité, la fatigue, la tristesse, l’angoisse, la facilité, le renoncement, le manque d’amour de soi, le manque de confiance en soi, une façon de soigner une blessure…

 

La nourriture ne nourrit pas que le corps, elle nourrit également l’esprit, elle l’apaise, c’est pour cela qu’elle peut parfois prendre si facilement le contrôle.

 

Essayez de ne pas finir la tablette de chocolat, essayez de ne pas finir le paquet de gâteaux pour voir.

 

On craque parce que l’on pense au réconfort que cela va nous apporter, tant sur le plan gustatif que sur le plan émotionnel, et puis on continue parce que ce sont des aliments addictifs du fait même de leur composition riche en sucre, le sucre appelle le sucre comme on le dit trivialement ; ils se mangent sans faim, se mâchent peu et ne rassasient pas.

 

Pour perdre du poids d’une manière saine, je crois qu’il faut lutter contre un ennemi invisible qui est la culpabilité. Il est normal de faire des aller retours, d’être parfois sérieux et parfois de ne pas l’être, il est normal de craquer, craquer fait partie du chemin, et il est plus sain de s’autoriser à craquer de temps en temps en travaillant à contrôler ses craquages plutôt que de se l’interdire et de se retrouver à adopter, au moment du craquage, la mentalité de : foutu pour foutu, j’abandonne car je n’y arriverai jamais.

 

La perte de poids est un chemin dont on s’écarte parfois et sur lequel on revient dès que possible, comme si vous faisiez une promenade en forêt, vous marchez sur un chemin de randonnée balisé et puis parfois vous vous en écartez pour cueillir de jolies fleurs ou de beaux fruits, admirer un magnifique point de vue et puis vous reprenez votre route balisée, sans culpabilité.

 

Pas de culpabilité.

 

Pas de restriction calorique car ce ne sont pas les calories qui comptent.

 

Mais de la détermination et l’envie de prendre de nouvelles habitudes.

 

Si vous êtes intéressé par mon approche, contactez-moi, nous prendrons un rendez-vous téléphonique pour en discuter.

 

Références bibliographiques :

 

« Les lois de l’obésité, tout ce que vous savez sur la perte de poids est faux » de Jason Fung, éditions Eyrolles, 2019

 

« Pourquoi on grossit » de Gary Taubes, éditions Thierry Souccart, 2015

 

 

[1] L’IMC (Indice de Masse Corporelle) est un indicateur utilisé pour évaluer la corpulence d’une personne. Il se calcule en divisant le poids (en kgs) par la taille au carré (en mètres). La formule est : IMC = poids / (taille en mètres) ².



13/01/2025
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